jeudi, 03 juillet 2014
Eglantine
Une jeune institutrice à ses débuts, originaire de la ville, fait un remplacement dans une école de la vallée de Lullin. Elle veut faire connaissance avec ses élèves et leur demande leur prénom :
– Quel est le tien? demande-t-elle à une petite fille.
– Maïon!
– Mais qu'est-ce que ça veut dire?
– Marie en patois.
– Bon, mais dès à présent tu t'appelleras Marie, comme toutes les Marie!
– Et toi mon petit?
– Fanfoué!
– Qu'est-ce que ça veut dire?
– François en patois.
– Bon, mais dès à présent tu t'appelleras François, comme tous les François!
C'est alors qu'intervient un petit déluré depuis un bureau du fond de la classe.
– Et vous, mademoiselle, quel est votre prénom?
– Églantine!
– Bon et bien dès à présent on vous appellera "grattacul"!*
Bernard Lacroix, Les cahiers du musée n°7.
* grattacul : églantine sauvage en patois.
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lundi, 21 avril 2014
Les plantes communes à nos talus, champs et jardins
Photographie de J-N Bart
Cet inventaire odorant et savoureux mêle des termes de notre patois savoyard (qui appartient au francoprovençal ou arpitan) à des sabaudismes, mots ou tournures fréquemment employés par les savoyards encore aujourd'hui. Bernard Lacroix qui a réalisé plusieurs collectes linguistiques de ce type, ne parle pas lui-même le patois lequel a commencé de disparaître à la fin du XIXe siècle. Nous reviendrons dans d'autres articles sur notre langue régionale que Marc Bron, président des enseignants de savoyard ou Joël Baud-Grasset, conseiller général de la Haute-Savoie, défendent avec passion.
EBM
*
Marcoret : mercuriale
Riolle : liseron
Cinquième ( cinq lobes à la feuille) : potentille
Sagne-nô (agit sur le sang) : achillée mille feuilles
Chapelet ( qui a des bulbilles sur les racines) : chiendent
Grammont : grand chiendent
Frénale ( aux racines entrelacées) : podagraire
Ouigne-pé (qui tire les cheveux): bardane
Sévenot : ravenelle ou moutarde
Pia-peu : renoncule pied-de-poule
Peuble (épinard sauvage): chenopode ou anserine
Lapai : rumex
Quawe de rnô : amaranthe queue de renard
La quawe : prêle
Taconnet *: tussilage
Ràna-bu (ses épines découragent le bœuf qui voudrait la manger) : bugrane
Carquevalle ( elle fait un bruit de grelot quand on la fauche) : rinante-onomatopée
Patte d'ours : berce
Pelagra : sainfoin
Minette : luzerne lupuline
Triolet: trèfle
Le triolta : touffe de trèfle blanc
Fenasse : haute graminée
Bâche ou lichen (pour empailler les chaises) : carex
R'baye me vi (qui résiste à la faux) : finette
dans le grand herbier du temps!
Bernard Lacroix, Les cahiers du musée nº6
*
* Dans le patois de Saxel, le taconnet ( tussilage en français) se dit takunè.
Proverbe :
Sé k a de la tèra a takunè
an a tozhœ trè ;
sé k a de la tèra a pyapœ
n an jamé prœ
Celui qui a de la terre à tussilage
en a toujours trop ;
celui qui a de la terre à pied de poule
n'en a jamais assez.
Le patois de Saxel,J.Dupraz ( Éditions Les Belles-Lettres, 1969)
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mercredi, 26 mars 2014
Les sobriquets
La ouêpa (guêpe) ou ... femme dangereuse!
Notre patois, lorsqu'il s'agit de désigner des personnes méchantes ou aux mœurs douteuses, leur donne le plus souvent des noms d'animaux domestiques, oiseaux, insectes... Les femmes sont les plus "gâtées", naturellement.
Poura vashe (pauvre vache) : femme de mauvaise vie.
Tievra (chèvre) : femme légère.
Tievra motte (chèvre sans cornes) : femme naïve.
Bérou (bélier) : homme naïf.
Botiou (bouc) : homme qui a la tête dure, simplet.
Belta (belette) : femme intrigante.
Sarpin (serpent) : femme qui a mauvaise langue.
Lmase (limace) : femme qui néglige son ménage.
Aragne (araignée) : femme négligée dans sa personne.
Pouet (cochon) : homme vulgaire dans son langage.
Fremi rushe (fourmi rouge): femme méchante.
Cocu (coucou) : sans commentaire.
Ouêpa (guêpe) : femme dangereuse.
Eterle ( chèvre qui ne prend pas le bouc) : femme stérile.
Mule : la même chose.
Seume (intraduisible) : femme qui a tous les défauts sus-mentionnés, tous les autres et pire que ça.
Bernard Lacroix, Les cahiers du musée n°4
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samedi, 11 mai 2013
Comptines chablaisiennes
Sculpture de Bernard Lacroix. Photographie galerie Fert.
Corbé, corbasse,
Ton pore est coué,
Ta more est couasse,
Corbé, corbé!
*
Piu, piu,
S'te peque mon nâ,
Z'tefô on coup d'estropie!
*
C'est l'Prince de Carignan
Qui s'en va t'à la guerre,
La guerre de Marignan,
Le Prince de Carignan.
Il avait un cheval
qu'avait la tête derrière
Et la queue par devant
Le Prince de Carignan.
*
Dodo pounette
Catherinette,
Endormez-moi cet enfant
Jusqu'à l'âge de quinze ans
Quand quinze ans seront passés
Il faudra la marier :
Dans une chambre
Pleine d'amandes
Un marteau pour les casser
De bonnes dents pour les manger!
*
Rondin, picotin,
La Marie a fait son pain
Pas plus gros que son levain,
Son levain était moisi
Son pain n'a pas réussi: tant pîs!
*
O Dian
Vin sé
Vin lé
Vin io
Vin bas
Y'a des bougnettes
Avoué du lâ.
*
Bin, bô,
La cloche du Lyaud
Qu'a zin d'batau
qu'un clu d'sevau,
Quoui y'est qu'la metto?
Y est l'fou du Lyaud!
*
Derrière chez ma tante
Y'a des pommes à vendre
Des rouges et des blanches
Quatre quatre pour un sou
Mademoiselle tournez-vous!
Les cahiers du musée n°6
22:11 Publié dans Mémoire du Chablais, Patois savoyard et sabaudismes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : sculpture bernard lacroix, galerie fert | Imprimer |
samedi, 04 mai 2013
Pour bien labourer
Pour bien labourer, il faut connaître l'oiseau : chaque temps a son précieux annonceur. Il y a par exemple, l'oiseau du point du jour qui réveille le laboureur sur quatre notes : " Féli tê lèvo?" (Félix, tu es levé?). L'oiseau de la pluie qui nous prévient et qui insiste : "Pluie, pluie,pluie!". Le "compte fagots" qui s'approche dès que le bûcheron sort le pain de la musette ... et tous les autres :
Le rabidolet (roitelet)
Le bossati (troglodyte)
Le fouifoui ( pinson)
Le momélot (loriot)
Le chaw (choucas des tours)
La pipine au Bon Dieu (bergeronnette)
Le cardinalin (chardonneret)
Le cul brelot (rouge-queue)
La matagasse (pie grièche)
L'agasse ( pie ordinaire)
La lordère (mésange)
La grive à pacot (grive musicienne)
La creblette (faucon crécerelle)
Le cocu (coucou)
Le corbé (corbeau)
Le piot (pic-vert)
Le piot jaillet (pic-épèche)
Le cou roge (rouge-gorge)
Le bouzat (épervier)
Le crenalet (tourterelle)
Le vardereule ( verdier)
Le générai (geai)
Le oué (buse)
Le tiou (milan noir du lac)
Le déboteni ( bouvreuil)
La bobue (huppe)
Le racle (martinet)
Le cul-blanc (hirondelle de fenêtre)
Le crapaud volant (engoulevent)
Le tiolu (merle)
La terraillette (fauvette)
... fidèles témoins de la geste saisonnière.
Bernard Lacroix, Les cahiers du musée n°10
23:46 Publié dans Mémoire du Chablais, Patois savoyard et sabaudismes | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer |