mercredi, 25 février 2015
Les cloches, 2
Photographie de Jean-Michel Lacroix, Rimons et son église (XIIe siècle)
Rappel :
Les cloches de Notre-Dame de Paris
Les premiers chrétiens firent de la cloche un symbole de ralliement. Plus tard, c'est l'évêque saint Paulin de Nole (353-431) qui installa les premières cloches dans les églises. Divers documents attestent qu'à partir du Ve siècle, les moines chrétiens fondaient des cloches. C'est dire l'ancienneté de cette tradition qui, miraculeusement, perdure dans nos plus grandes villes comme dans nos plus petits villages européens.
On peut s'émerveiller que dans les églises de certains villages de France, les cloches soient toujours sonnées manuellement. C'est le cas de l'église de Rimons, en Gironde, dont le sonneur n'est autre que Jean-Michel Lacroix. Voici son témoignage, en écho à celui de son oncle, Bernard Lacroix :
" Je suis le sonneur de l'église de Rimons (XIIe siècle), village qui nous a si bien accueillis en Aquitaine.
Á ce titre, je sonne à la main pour toutes les sépultures : une sonnerie au lever du jour et une à la tombée de la nuit pendant les trois jours précédant l'inhumation. Chaque sonnerie est identique : une petite minute à la volée puis un coup d'arrêt, puis trois coups pour les hommes et deux (seulement, hihi) pour les femmes. Puis encore quelques secondes et une autre volée. Ceci trois fois de suite.
Pour la messe d'enterrement, je sonne pour l'entrée du corps à l'église et pour sa sortie jusqu'à la dépose du cercueil devant la tombe avant la dernière prière.
Ce rituel m'a été enseigné par l' ancien sonneur maintenant trop âgé, qui le tenait lui-même d'un ancien sonneur qui le tenait...etc"
Trois coups pour les défunts et deux coups pour les défuntes, ce n'est pas la parité... et ça t'amuse, Jean-Michel? !!! Fais gaffe aux féministes si tes coups de cloche leur arrivent aux oreilles!!!
Élisabeth Bart-Mermin
23:00 Publié dans Patrimoine d'ici et d'ailleurs | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jean-michel lacrois, rimons gironde | Imprimer |
jeudi, 19 février 2015
Les cloches,1
Photographie JN Bart, Église et cimetière de Meillerie
Rappel:
Les cloches de Notre-Dame de Paris
La Defini ( de defunctus, défunt...) :
Sonnerie qui annonçait la mort d'un habitant du village. Elle commençait par la petite cloche pour une défunte, par la grosse cloche pour un défunt. Ainsi, le travailleur des champs, qui se découvrait et cessait un instant son travail, savait si c'était un homme ou une femme qui venait de mourir. On répétait la sonnerie la veille de l'enterrement. Lorsque le curé du village mourait, en plus des sonneries habituelles, on donnait toutes les heures et jusqu'au moment des funérailles un seul coup de la grosse cloche.
*
Il y a une soixantaine d'années, lorsque le curé du village mourut, le sonneur "prit pension" chez la Génie à Set dont le café était bien placé puisque situé juste en face de l'église. Il allait donc toutes les heures donner un coup de la grosse cloche. Á la fin de la journée, mettons nous à sa place, le pauvre homme pouvait aller de moins en moins en avant et de plus en plus en arrière. Vers les minuits, inquiet de ne pas le voir revenir de l'église, un de ses copains qui lui tenait compagnie au bistrot, alla prendre de ses nouvelles. Il s'en revint rassuré et expliqua la situation aux buveurs attablés :
" Y risque de rin, y pu pas mê tombo, y s'tin après la ceurde, mai y pu plu la lachi!" *
Bernard Lacroix, Les cahiers du musée n°7
* "Il ne risque rien, il ne peut pas tomber, il se tient après la corde mais il ne peut plus la lâcher!"
13:34 Publié dans Mémoire du Chablais, Patrimoine d'ici et d'ailleurs | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer |
samedi, 14 février 2015
La sculpture de Bernard Lacroix, entre Nature et Culture
Troupeau de chèvres, sculptures de Bernard Lacroix
Rappel :
Portraits en pied, sculptures dérobées chez Bernard Lacroix, de Jean-Claude Fert.
Exposition de peintures et sculptures de Bernard Lacroix à la galerie Fert
La matière première est issue des rebuts de la première mécanisation de l'agriculture ou de morceaux d'outils paysans aujourd'hui obsolètes. Vieux ressorts, bielles de moteur de tracteurs, manivelles, lames de faucilles...
Le bestiaire, principal sujet de ses volumes, est alors une allégorie de la vie et de l'Homme. C'est aussi une réflexion sur l'intervention perturbatrice de la machine dans le cycle naturel des travaux des champs qui au début du XXe siècle structurait encore l'ensemble de la société. Ce bestiaire semble tranquillement affirmer une certaine rémanence de l'animal sur le progrès technique. La machine redevient animale et organique en soulignant à son tour la dialectique (infernale?) entre Nature et Culture.
Si l'ensemble n'est pas dénué d'humour et d'impertinence créatrice, on aurait tort également de le ramener à cette seule qualité.La sculpture animalière de Bernard Lacroix traverse la charge symbolique que l'humain donne à l'animal.
Pour exemple, on citera la chouette représentant la sagesse, ou encore l'arbre de vie dont l'artiste rappelle l'existence de tout temps dans l'imagination des peuples : " Entre l'arbre de vie sur une broche Scythe de la Russie du VIIe siècle av. J-C. et l'arbre de vie gravé sur un plat de matefaim de la poterie de Marnaz au début du siècle dernier, 2700 ans se sont écoulés". Rajoutons quelques années pour parvenir à L'arbre de vie créé récemment par l'artiste qui perpétue cette trame archaïque :
Arbre de vie, sculpture de Bernerd Lacroix
Matériaux ferreux mixtes soudés.
Si le bestiaire occupe une place importante, en étudiant l'ensemble de la production de l'artiste, on découvre aussi des sculptures abstraites réalisées à partir des mêmes rebuts rouillés. La rigueur de leur construction dans l'espace renvoie avec réussite aux racines de l'art moderne. Bernard Lacroix prend alors à contre-pied le regard du spectateur, qui, au-delà du sujet animal, peut alors à loisir entrevoir le jeu autonome de la matière ou des formes dans l'espace et le vide.
Jeu de la matière lorsque l'artiste laisse à voir le grain de la rouille, les traces d'anciennes peintures patinées, les entailles vives laissées par la meuleuse. Cette approche matiériste et fruste fait écho à l'arte povera (1) des années 70.
Jeu des formes lorsque l'artiste recouvre d'une peinture noire et mate ses éléments soudés, leur permettant, ainsi unifiés, de dessiner l'espace de leur contour. On imagine alors avec plaisir des correspondances avec le parcours d'un Jean Tinguely (2) et d'un Alexandre Calder.
Alain Livache, Catalogue de l'exposition Bernard Lacroix au Conservatoire d'Art et d'Histoire d'Annecy, (2001) pp.10-1.
(1) Arte povera : expression italienne qui signifie "art pauvre", utilisée pour la première fois en 1967 à l'occasion d'une exposition à la galerie Bertesca de Gênes. Les œuvres que les artistes y exposent recourent à des matériaux qui sont délibérément précaires, communs et associés à un imaginaire rural et artisanal. Artistes représentatifs: Mario Merz, Gilberto Zorio, Giuseppe Penone.
(2) Jean Tinguely, né en 1925 en Suisse, fit partie du mouvement de l'art cinétique et en 1960, fut cofondateur du mouvement des "nouveaux réalistes". Il réalise des sculptures/machines à partir de récupération et dont les mouvements ne servent à rien. Il stigmatise ainsi la vacuité d'un siècle de croyance en la machine toute puissante.
18:13 Publié dans L'œuvre artistique de Bernard Lacroix | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer |
dimanche, 08 février 2015
Dans la cave
Croquis de Bernard Lacroix ( Croquis Minute)
Rappel :
Quand un paysan de par chez nous vous invitait à prendre un verre dans sa cave, il se servait toujours le premier. Dieu sait pourtant s'il le connaissait, son cidre maison, mais on ne sait jamais." Vous allez boire ce que je bois, tout simplement". Il levait son verre après la première lampée, claquait la langue, vérifiait la limpidité du contenu en clignant de l'œil :
"C'est des poires vouargnes avec des crésons de Boussy, c'est ce qui le fait rester clair, il ne graissera pas!"
Puis, chacun à son tour faisait un petit commentaire, le plus souvent élogieux, cela va de soi.Puisque tout le monde utilisait le même verre, on en laissait toujours un peu dans le fond pour le jeter d'un geste brusque sur le sol de terre battue.
" – Encore un?
– Si tu veux!"
C'était bon signe. Et puis deux, et puis trois, jusqu'à ce que les dents de derrière baignent. Celui qui n'en voulait plus retournait le verre.
" Ça suffit, je vais me faire attraper par la patronne!"
On remontait en s'essuyant la bouche. On restait toujours un petit moment au sommet de l'escalier, mais comme la conversation, surtout au moment des élections, donnait soif, on redescendait, on remontait, on redescendait... Ça finissait par du pain, du jambon, du saucisson... des bousculades...
" C'est bientôt fini votre commerce?!" criait la maîtresse de maison en tapant avec le balai sur le plancher.
" Laissez-la faire, elle finira bien par se calmer!"
Alors, dans la nuit brune, nous venaient par intermittences des bramées d'outre-cave à en faire tourner le lait des vaches : La petite Bohémienne, La Berceuse de Jocelyn, Le Rêve passe, le Credo du paysan... et je te recommence jusqu'à ce que le coq prenne la relève.
Bernard Lacroix, Les cahiers du musée n° 3
14:05 Publié dans Mémoire du Chablais | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer |
lundi, 02 février 2015
Espoir
Écarte un peu les nuages
Pour qu'il en sorte l'oiseau bleu
Qui a nom: Espoir!
Vol obstiné dans le ciel d'hiver,
Reflet d'une voile oubliée entre deux orages,
Enseigne du paradis,
Neige éternelle au fronton de la douleur.
Bernard Lacroix, Reflets oubliés
11:39 Publié dans L'œuvre poétique de Bernard Lacroix | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer |