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dimanche, 30 novembre 2014

Les colombes en bois, 3

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Colombe de la paix

 

 

J'ai une de ces colombes en bois dans ma cuisine. Elle me suit partout et elle est passée par mes chalets d'alpage, mon petit chalet de la "ferme des enfants", l'Irlande etc... Le ventre de l'oiseau est légèrement brûlé, parce que c'est un plaisir de le voir danser lorsqu'on place la lampe à pétrole ou la bougie juste au dessous. La chaleur provoque des turbulences qui la font vivre.

Au moment où j'écris, elle danse au dessus de moi, bronzée à la fumée de tous les foyers qui m'ont réchauffé. Merci aux anciens, peut-être très anciens, qui ont eu cette belle idée d'inviter un oiseau à égayer leurs soirs.

 

Mon oiseau est né d'une branche d'épicéa, d'un couteau Opinel, pour enfin partager notre confort. Il vit désormais en Aquitaine.

 

Jean-Michel Lacroix

mardi, 25 novembre 2014

Les colombes en bois, 2

 

art populaire, colombe en bois

Croquis Les cahiers du musée n°5

 

 

 

 

 

La fabrication d' une colombe en bois

 

Travail de préparation:

 

L'oiseau se compose de deux blocs de dimensions à peu près identiques, planchettes d'épicéa fin et sec de 15 cm, 2 ou 3 cm d'épaisseur. Le premier bloc servira à façonner dedans la tête, le corps et la queue, le second l'ensemble des ailes (voir les croquis ci-dessus) ; à la partie supérieure du dos, on taille une mortaise de 4 cm de profondeur et de 0,7 cm de largeur sur 2 cm de longueur. Sous le ventre, on pratique avec la lame deux fentes servant à introduire les pattes. L'artisan façonne les futures plumes en entaillant le bloc de bois par deux ou trois encoches verticales qu'il nomme les "crochets", puis il taille en pointe les extrémités du bloc, il ponce les pièces produites et s'apprête au travail le plus délicat.

 

La taille des plumes et leur mise en place :

 

Il s'agit de fendre avec précision des lamelles d'un millimètre d'épaisseur sans faire riper la lame extrêmement aiguisée, sinon ce sont les doigts qui s'ornent de belles entailles...

L'homme appuie la pièce de bois contre sa poitrine et entaille le bois, dans le sens du fil, en coupant de l'extérieur vers soi ; lorsque la lamelle est faite, il l'écarte légèrement à l'aide de la lame du couteau et puis la met doucement en place, une fois sur la droite, l'autre sur la gauche de la première fabriquée (voir croquis).

Les plumes se coincent contre la dernière qui a été positionnée et finissent par ressembler à un éventail étalé. Cependant ce travail serait impossible à réaliser si, auparavant, on n'avait mis le bois préparé à bouillir dix minutes dans l'eau.

Les colombes rudimentaires ont des ailes plates et possèdent un nombre restreint de plumes alors que les bons ouvriers parviennent à donner des arrondis à la queue et aux ailes ; ils sortent des oiseaux ayant quarante-deux à quarante-cinq plumes aux ailes.

 

La finition :

 

Il ne s'agit plus que de détails aisés à réaliser : la pose des pattes fines comme des allumettes, les pyrogravures des yeux et du bec, une couche de vernis incolore sur le bois pour le protéger.

 

Propos recueillis auprès de Fernand Marclay, originaire de Vacheresse, Les cahiers du musée n°5

vendredi, 21 novembre 2014

Les colombes en bois,1

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Colombe d'Abondance

Épicéa taillé et sculpté, XXème siècle (Collection Bernard Lacroix)

Ces colombes fabriquées en alpage étaient suspendues au plafond des maisons comme porte-bonheur. Aujourd'hui, leur fabrication et leur diffusion restent très confidentielles.

 

 

 

Ce serait la vue d'un oiseau d'altitude bien connu des chasseurs de chamois, appelé communément le "papillon" des rochers ( tichodrome échelette) qui aurait inspiré la fabrication des oiseaux de bois dans nos vallées. Ses ailes déployées, aux plumes dentelées alternativement rouges et noires, sont en tout semblables à celles reproduites par nos artistes montagnards.

On retrouve des exemples de cet art populaire traditionnel dans plusieurs pays d'Europe : l'Italie, la Pologne, la Russie, la Hongrie... mais aucun de ces petits chefs-d'œuvres n'a l'élégance, la beauté fragile de ceux que l'on faisait dans le Haut-Chablais il y a peu d'années encore.

 

Autrefois, les bergers en alpage occupaient comme ils pouvaient les interminables heures de gardiennage du bétail et comme ils avaient toujours un couteau en poche et du bois, ils sculptaient toutes sortes de choses: des bâtons, des croix, des sifflets, des manches et puis des oiseaux. En patois on dit que les bergers s'amusaient à "chapoter" du bois.

 

Bernard Lacroix, Les cahiers du musée n°5

 

 

 

 

mardi, 18 novembre 2014

Le papillon

 

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Rappel :

La lumière

Le papillon

Papillon de nuit

 

 

 

*

 

Heureux le papillon

Dont la seule besogne

Est de se poser sur le cou frêle des moissons.

Il ne connaît des saisons que le soleil,

Des fleurs que le parfum,

De la vie que l'amour.

 

Laissez, fillettes bleues,

Laissez-le vivre sa chance :

Une joie passe,

Un sourire s'envole,

Un été s'en va...

 

 

Bernard Lacroix, Petites choses d'hiver

 

 

 

jeudi, 13 novembre 2014

Prière

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Cimetière militaire de Tracy-le-Mont ( Photographie JN Bart, 18 octobre 2014)

 

 

 

 

 

Ayez pitié, Seigneur,

De ceux qui n'ont

Ni mère

Ni épouse

Ni ami

Pour les aider à mourir.

 

Ayez pitié de ceux qui agonisent

Dans la solitude d'un champ de bataille

D'un hôpital

D'une prison...

 

Je vous le demande

Au nom de ceux qui étaient à vos côtés sur le calvaire :

Simon de Cyrène, le paysan courageux,

Jean, l'ami des bons et des mauvais jours,

Les Saintes Femmes,

Le soldat compatissant,

Le larron repenti...

 

Au nom de votre mère

Qui saura mieux que personne

Éponger leur dernière sueur

Étancher leur dernière soif.

 

Ainsi soit-il.

 

 

Bernard Lacroix, Petites choses d'hiver

mercredi, 05 novembre 2014

Le Nombre d'Or

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Bernard Lacroix, Lac Léman

 

 

 

 

Le voilà, en vrai, le Nombre d'Or :

la parfaite ordonnance de l'espace,

la montagne pour une fois rassurante,

les peupliers piliers du ciel,

une petite voile craintive et naïve,

le lac qui profite de tout ça et déjà l'automne

qui frappe à la porte du temps.

 

 

Bernard Lacroix, Des paysages, des saisons, des jours, des heures... (2014)

samedi, 01 novembre 2014

Sylvie

 

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Dessin de Bernard Lacroix, Les cahiers du musée n°2

 

 

 

 

Rappel:

La Toussaint

Nos morts

In memoriam, Jean Lacroix

 

 

En ce jour de la Toussaint,Les amis de Bernard Lacroix rappellent le souvenir de leur ami Jean Lacroix, décédé le 28 avril dernier. Il nous manque.

 

 

*

 

 

Je rencontrais un soir d'hiver la vieille Sylvie qui sortait du cimetière, la nuit largement tombée. Comme je lui en faisais la remarque, elle eut cette explication pour le moins inattendue: " Y'est lou môts que m'fan dremi". ( C'est les morts qui me font dormir.) Son fils, à qui je racontais la curieuse rencontre, me confia que sa mère avait toujours prétendu tenir un bon sommeil de ses visites quotidiennes au cimetière et au fait d'entretenir fidèlement la tombe des morts oubliés. Naturellement, cela va tout à fait à l'encontre de notre manière d'aborder le sujet. Pour la plupart d'entre nous qui n'oseraient pas traverser un cimetière la nuit, la pensée des morts nous empêcherait plutôt de dormir. Comment la vieille Sylvie avait-elle pu acquérir autant de sagesse, de sérénité? Sa réaction me laissa penaud et pensif. De nos jours, on a peur des morts, on les escamote, on s'en débarrasse en vitesse car ils dérangent notre confort routinier, on n'en veut plus chez soi, chez eux en définitive.

Une belle dame de Thonon s'exclamait au cours d'un dîner où l'on devait parler de cela: "Quand mon mari mourra, je ne veux pas qu'on le laisse à la maison, j'aurai bien trop peur!". Le pauvre homme qui se trouvait à ses côtés faillit en avaler sa fourchette.

 

Bernard Lacroix, Les cahiers du musée n°2