Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

mercredi, 30 janvier 2013

Une voile à son nom

numérisation0014.jpg

Voile, gouache de Bernard Lacroix




Je ne suis pas le seul à ressentir


Dans ces moments immobiles où les bons vents s'apprêtent,

Un désir soudain pour des espaces sans fin

Où même l'esprit fait silence.


Dans quel port est le bateau qui m'attend?

Il a peut-être une croix sur la grande vergue?


On a tous quelque part une voile à son nom!


Bernard Lacroix, Ciels, arbres et labours

lundi, 21 janvier 2013

D'où nous viennent...

quai des brumes,1.jpg



D'où nous viennent parfois

 

   Ces odeurs de sel et d'épices,

   Ces brides de complaintes

   Qui parlent de bière rance et d'alcool à deux sous ?

   Ces images de venelles hostiles que l'on fuit

   Pour des bouges innommables ?

   Ces amours de passe

   Qui laissent au coeur des plaies béantes

   Où les regrets s'installent

   Comme le crachin dans la lèpre des quais ?

 

Bernard Lacroix, Reflets oubliés

 

  

jeudi, 17 janvier 2013

Un vieux cheval...

 



Un vieux cheval et son vieux maître

S'en vont si bien, cahin-caha,

S'en vont si bien qu'on ne sait pas

Si le cheval mène le maître

Ou le maître mène le pas.

 

Combien de temps, jusqu'à quel âge

S'en iront-ils, ces frêres-là,

Prêter aux gens du voisinage

L'un ses jambes, l'autre ses bras ?

Combien d'étés, de labourages ?

 

Un vieux cheval et son vieux maître

S'en vont si vieux, cahin-caha,

S'en vont si vieux qu'on ne sait pas

Si le cheval suivra le maître

Ou le maître suivra le pas.

 

Seigneur, écoutez ma prière:

Il y a bien au paradis

Des blés mûris, des foins à faire ?

J'en connais deux dans le pays

Qui feraient juste votre affaire !

 

Bernard Lacroix, Vents de terre

mercredi, 16 janvier 2013

La Barque

numérisation0006.jpg

La Barque, gouache de Bernard Lacroix




Sans la barque

Au petit matin,

On ne saurait pas

La limite entre le ciel et l'eau :

Le même gris bleuté

La même lumière verticale

Le même silence translucide,

Qui ne tolère qu'un cri d'oiseau,

Maître chez lui,

Ou la plainte menue

D'une vague solitaire.


Bernard Lacroix, Ciels, arbres et labours

mardi, 08 janvier 2013

Crépuscule

numérisation0004.jpg

Crépucule, gouache de Bernard Lacroix.




Le soleil abdique

Laissant la nuit répandre sa noire uniformité.

Bientôt, qui se souviendra du jour?


Ainsi deviennent les amours :

Quelques souvenirs désséchés

Entre deux pages de vie,

Anonymes et reclus

Dans le grand herbier du temps.


Bernard Lacroix, Ciels, arbres et labours

dimanche, 06 janvier 2013

Epiphanie. Puer natus est.

 

bernard lacroix,poésie,épiphanie,adoration des mages,fra angelico,puer natus est,cahiers du musée de fessy

Fra Angelico, L'Adoration des Mages



En ce jour de l'Épiphanie, ce poème de Bernard Lacroix que j'avais omis dans son ensemble de Noëls ( où désormais il a retrouvé place). EBM.


Puer natus est


Dans la paix tiède de l'étable

Bêtes et gens se sont tus.

Le silence écoute le silence.

L'obscurité tend l'oreille à la nuit.


Le temps s'est installé

Bien au chaud

Pour quelques heures sans histoires.

Le sommeil exorcise

L'attente inquiète du jour.


Les pleurs d'un nouveau-né

Viennent

Tout à coup,

Importuner la nocturne routine.

Les choses sont ainsi faites :

C'est en pleurant

Que l'homme découvre le monde.

Le rire viendra plus tard,

Plus tard aussi,

Le regard enfin rassuré et confiant.


On posera l'enfant

Sur un petit tas de paille fraîche

Et le silence

Á ce moment là,

Saura ce qu'il veut dire.


J'ai pleuré ma vie

Moi aussi

En son temps

Et ne suis vraiment né

Que devant le sourire de ma mère!


Bernard Lacroix, Cahiers du musée n°9.



samedi, 05 janvier 2013

L'Hiver

numérisation0001.jpg

L'Hiver, gouache de Bernard Lacroix

 




Sur l'ardoise du temps

L'hiver qui doit être gaucher

Efface de son gros coude

Les maisons et les arbres.


Une brume douteuse racole

L'âme imberbe des labours.


Bernard Lacroix, Ciels, arbres et labours.

lundi, 24 décembre 2012

Solstice d'hiver

 

solstice d'hiver.jpg




Autrefois, en Savoie, le soir de Noël, on remettait les cloches aux vaches.

Dans des temps pas si anciens que mes Anciens ont eux-mêmes connus, la tradition voulait que la nuit de Noël, on sorte les vaches à minuit, après la messe, pour leur faire boire "l'eau fleurie" au bassin.

Le terme "eau fleurie" témoigne de notre appartenance au monde celtique:

pour avoir moi-même partagé cinq années de ma vie avec nos frères d'Irlande,

je peux attester de l'importance qui a toujours été donnée à l'eau, et reconnaître

dans le terme utilisé, l'ancienne connaissance qui nous unit. Le terme de Puits Sacré ne vous dira peut-être

rien en langue gaelique, mais il suffit, par ce poème, de

garder en mémoire tout ce qui nous lie encore

aux Anciens.


Jean-Michel Lacroix


*

 

Les vaches,

 

Que d'aucuns croient stupides,

Témoignent ce soir-là

Du solstice de toutes les promesses:

 

Elles boivent "l'eau fleurie",

Elles paissent l'herbe de mémoire,

Elles ruminent les pollens engrangés.

 

Là-haut, pour une nuit,

La source n'est plus orpheline,

Les roches appellent les toisons errantes,

La cendre sous le chaudron imagine le feu nouveau.

Dans les sentiers, des bruits familiers s'inventent...

 

Les cloches tintent au plus profond des étables.

 

Dehors,

Il y a désormais une étoile entre Dieu et les hommes:

L'été vient de naître.

 

Bernard Dominique Lacroix



 


jeudi, 20 décembre 2012

Noël

IMG_2237.JPG

Photographie Juan Asensio




Une seule fois

Une seule

Dans l'histoire du monde

La nuit,

Délaissant pour un instant

La peur et la mort,

La guerre et le crime,

Le vice et la misère...


Une seule fois

Une seule

Dans l'histoire du monde

La nuit,

Mère abusive de l'ombre,

A enfanté de la lumière!


Bernard Lacroix



Poème envoyé par Bernard Lacroix à la famille Mermin lors du décès de Henri Mermin, Noël 1994.

mardi, 18 décembre 2012

Bel enfant, 2

fa_nativite_forli_hd.jpg

Fra Angelico, Nativité



Bel enfant,


Je vais te faire une place,

Une toute petite place

Dans l'étable nauséabonde de ma vie.

Un petit coin où je pourrai te cacher

Bien au chaud au creux de mes mensonges?


J'essaierai de t'y garder le plus longtemps possible

Et si, par malheur, tu décidais de t'enfuir,

Je te clouerai sur le bois que je te prépare en douce

Jusqu'à ce que le sang jaillisse de tes mains adorables.

Alors,

Je me ferai un bonheur avec ton souvenir.


Bernard Lacroix, Reflets oubliés