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dimanche, 16 décembre 2012

Bel enfant...

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Georges de La Tour, L'adoration des bergers




Bel enfant qui souris dans tes langes

N'écoute pas les anges

Te chanter : " Gloria,

Roi de toute la Terre!"

Roi de toutes les misères

Tu seras!


Bel enfant, Mages et bergers s'assemblent,

Ils vont venir ensemble:

Prends garde! Ces gens là

Qui se disent des frères,

Feront pleurer ta mère,

Tu verras!


Bel enfant, il faut bien que tu saches :

C'est une croix qu'ils cachent,

Une, puis deux, des tas...

Tant que la ronde est ronde

Toutes les croix du monde

Les voilà!


Bernard Lacroix, Petites choses d'hiver

vendredi, 14 décembre 2012

Grisaille

 

Il n'y a pas de maison qui vaille

Ni arbre non plus.

 

Le ciel et l'eau se confondent

Se fondent

Se morfondent :

Mornes épousailles

 

Que de choses diffuses

Confuses

Recluses...

 

Que de bruits cachés

Hachés

Mâchés

Gâchés...

 

Il n'y a pas âme qui vaille

Si :

Semblant tomber soudain des cintres du temps

Un héron efféminé

Réussi un triple axel

 

Pour rien !

 

Bernard Lacroix

jeudi, 13 décembre 2012

Les peupliers

 

 

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Les Peupliers, gouache de Bernard Lacroix




Un paysage sans peupliers

Est un paysage en sursis.


L'or futile du soir

Ignore tout des dangers qu'il engendre.


Étroitement unis et solidaires,

Les peupliers repoussent

Les douleurs du jour.


Bernard Lacroix, Ciels, arbres et labours.

mardi, 11 décembre 2012

Private joke

 

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Une ancienne blague de Bernard Lacroix qui nous faisait beaucoup rire quand nous étions enfants. Une private joke entre Chablaisiens... Que les lecteurs d'ailleurs nous excusent!

EBM

*


Quand la fusée arriva sur la lune,

Savez-vous ce qu'elle trouva?


... Des Genevois

Qui cherchaient des champignons...


Bernard Lacroix, Petites choses d'hiver

mercredi, 05 décembre 2012

Nos villes anciennes

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Le vieil Annecy



Quand on flâne dans nos villes anciennes, ou plutôt dans ce qu'il en reste, on se rend compte tout de suite qu'elles ont été conçues par des architectes, certes, mais des architectes urbanistes et humanistes. On ne peut s'y ennuyer. On dit que "la symétrie rassure les cons" et bien, dans l'habitat ancien de chez nous, rien n'est symétrique, c'est tout en notre honneur.

Sous les arcades, les ménagères pouvaient faire leurs courses les jours de pluie sans se mouiller, deviser tout à loisir et Dieu sait si c'est important pour elles. Les couleurs vives et variées des façades faisaient, étant donné l'étroitesse des rues, que les murs vus des fenêtres d'en face prenaient des lumières de printemps. Les petites places à fontaines venaient, ça et là, soulager l'élan des ruelles, apporter du soleil et de la fraîcheur en même temps.

Quand je visite les vieux quartiers d'Annecy, je m'attends à y croiser, tout à coup, Monsieur de Genève (1) tenant son chapeau d'une main et relevant le bas de sa soutane violette de l'autre. Il aimait fort, dit-on, se mêler à ses gens et, malgré ses prenantes fonctions, écouter patiemment leurs "plaintes menues". C'est certainement l'homme qui nous a le plus aimés, c'est pourquoi nous l'aimons encore d'un amour sur lequel le temps n'a pas de prise.


Bernard Lacroix, Cahiers du musée n°3.


(1) Monsieur de Genève: saint François de Sales ( 1567-1622), docteur de l'Église, patron des journalistes et des écrivains.

De 1594 à 1598, missionnaire dans le Chablais qui était devenu calviniste, résident au château des Allinges, il invente les tracts : il fait imprimer ses sermons sur des feuilles volantes qu'il placarde dans la ville de Thonon pour les distribuer à la population, c'est pourquoi l'Église l'a fait patron des journalistes. L'un des premiers chablaisiens convertis est Antoine de Saint-Michel, seigneur d'Avully sur la commune de Fessy.

En 1602, il devient évêque de Genève mais la ville étant protestante, son siège épiscopal est à Annecy.

En 1610, il fonde avec sainte Jeanne de Chantal l'Ordre de la Visitation.

C'est aussi un grand écrivain, auteur de Introduction à la vie dévote et Trailé de l'amour de Dieu.

Sa devise était: Rien par force, tout par amour.



lundi, 03 décembre 2012

La pauvre Génie (Eugénie)


La pauvre Génie était sourde

Comme un pot

 

Et encore

Et tant

Qu'elle n'entendit pas la mort venir.

 

Ni aussi le médecin

Appelé à la hâte

Ni les amis en visite

Ni les proches rassemblés

Pour une ultime prière...

 

Elle partit pour toujours

Les yeux grands ouverts

 

Passant sans s'en rendre compte

D'un silence à l'autre.

 

Bernard Lacroix

vendredi, 23 novembre 2012

Les cloches de Notre-Dame de Paris

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Inscription sur la cloche Etienne, l'une des huit nouvelles cloches de Notre-Dame de Paris. Photographie JN Bart, fonderie Cornille-Havard, le 13 octobre 2012.


Le 23 mars 2013, les cloches de Notre-Dame de Paris sonneront à toute volée pour la solennité des Rameaux. On entendra pour la première fois un ensemble composé de huit nouvelles cloches pour la tour nord et d'un nouveau bourdon pour la tour sud, ensemble qui aura été présenté au public et béni le samedi 2 février 2013.

Chers lecteurs, vous pouvez écouter la reconstitution de la sonnerie des tours de la cathédrale à la fin du XVIIIe siècle telle qu'elle sera rétablie avec ce nouvel ensemble campanaire, ainsi que découvrir l'historique de la sonnerie de Notre-Dame de Paris et le déroulement de cette magnifique réalisation vouée au jubilé des 850 ans de la plus célèbre des cathédrales françaises, ICI. (1)


Seul le bourdon Marie aura été réalisé par la fonderie hollandaise Royal Eijsbouts, à Asten. Les huit cloches de la tour nord seront l'œuvre de la fonderie Cornille-Havard, à Villedieu-les-Poêles, dans la Manche, discrète petite ville et néanmoins l'un des plus beaux fleurons de l'artisanat français, riche d'une longue histoire.Notre pays  abrite toujours ce merveilleux art campanaire, un art qui a traversé les siècles, grâce à trois fonderies, Cornille-Havard, Paccard en Haute-Savoie et Bollée à Orléans, les seules dans l'Hexagone.Portant au plus haut niveau l'exigence de qualité, riches d'un savoir-faire issu d'une tradition multiséculaire, ces trois entreprises exportent leurs créations dans le monde entier.

Vous pouvez visiter le site de la fonderie Cornille-Havard ici et celui de la fonderie Paccard là.

Fondée en 1715, la fonderie Bollée est la plus ancienne. Sise à l'origine à Annecy-le-Vieux où elle fut fondée en 1796, la fonderie Paccard s'est installée en 1989 dans des bâtiments modernes à Sévrier, au bord du lac d'Annecy. C'est elle qui a fondu La Savoyarde, l'une des cloches de l'église du Sacré Cœur de Paris. La plus récente, la fonderie Cornille-Havard, est née en 1865 mais n'a jamais quitté son atelier d'origine à Villedieu-les-Poêles. Rien n'a changé depuis le XIXe siècle dans cet atelier où le visiteur peut découvrir, en ce moment, les différentes étapes de la fabrication des cloches de Notre-Dame. C'est un travail d'extrême précision afin d'obtenir la sonorité souhaitée. Les décors sont réalisés en relief sur un moule puis le métal en fusion y est introduit, prenant la forme exacte de la cloche. Chaque cloche reçoit un prénom qui rend hommage à de grands saints et à des personnalités ayant marqué la vie du diocèse de Paris et de l'Église.

Les cloches Marcel et Etienne ont été coulées le 3 août, Denis, Maurice et Jean-Marie, le 13 septembre 2012. La coulée demande une grande attention et un immense savoir-faire. Pour celle du 13 septembre, de 8 tonnes 500, il a fallu allumer à 4h15 le four réverbère du XIXe siècle, puis le chauffer pendant huit heures pour la coulée à 12h15.


Un mois plus tard, le 13 octobre, voici ce que j'ai vu à l'atelier :


 

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Moule  dans la fosse, en attente de la coulée.

 

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Denis ( en l'honneur de saint Denis, 1er évêque de Paris vers 250 et patron du diocèse) cloche de Notre-Dame en attente du polissage.

 

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Etienne ( en l'honneur de saint Etienne, 1er martyr mais aussi nom de la basilique érigée à partir de 690 à l'emplacement actuel de la cathédrale), dans la cour de la fonderie, prête à ... s'envoler vers Notre-Dame!

 

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Inscription latine sur Etienne : Via viatores quaerit, La voie appelle les voyageurs.

Photographies JN Bart

 

*

 


La cloche est un instrument de musique ; un ensemble comme celui de Notre-Dame de Paris crée un paysage sonore. Tout l'art campanaire consiste à trouver la note juste, chaque cloche ayant la sienne ; d'ailleurs, dans la cour de la fonderie Cornille-Havard, chacun peut s'exercer sur un carillon mis à la disposition des visiteurs.

Si elle se prête à des usages profanes, la cloche est avant tout un instrument de musique sacrée qui occupe une place irremplaçable dans la liturgie catholique. Elle est, selon le mot de Charles Péguy, "la voix de Dieu". Via viatores quaerit, vox viatores quaerit : elle appelle les voyageurs que nous sommes sur cette terre, au recueillement, à la prière, à l'allégresse des grandes fêtes liturgiques, Noël, Les Rameaux, Pâques, La Pentecôte... Elle se tait pendant la Semaine Sainte puis sonne à toute volée le jour de Pâques : qui n'éprouve alors, qu'il soit croyant, agnostique ou athée, un élan d'espérance? La musique des cloches exprime aussi les émotions et sentiments des évènements familiaux, le mariage, le baptême, le décès, ou des grands évènements collectifs telle la libération de Paris, en 1944.

Dans l'ancien monde rural qui avait un sens du sacré que nous avons perdu, la cloche rythmait les journées des paysans comme le rappelle Bernard Lacroix dans ses Notes sur la vie d'autrefois en Chablais :

" Ponctuée par la sonnerie de l'Angélus, la journée se déroulait selon un rite immuable, je l'appellerais : la liturgie du quotidien.

La foi était intimement mêlée à la vie quotidienne. [...] Aux champs, les hommes se découvraient quand sonnait l'Angélus."

Aujourd'hui, notre vie est rythmée par d'autres sonneries, les bip-bip sans âme produits par la technologie, des bruits exaspérants, des musiques vulgaires envahissantes. Il n'empêche... Une part de l'ancien monde perdure, résiste, une part éternelle. Les nouvelles cloches de Notre-Dame, pour son 850e anniversaire, témoignent que si les civilisations sont mortelles, il reste toujours quelque chose d'elles, un souffle et une flamme qui ne se sont jamais éteints, prémices d'une renaissance. Que serait Notre-Dame sans ses cloches, que serait Paris sans Notre-Dame? Une coquille vide, un squelette.


Élisabeth Bart-Mermin


(1) Merci à Jean-Michel Lacroix, sonneur de cloches pour son petit village de l'Entre-Deux-Mers, qui m'a envoyé ce lien.



lundi, 19 novembre 2012

La vieille maison

 

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 La vieille maison, gouache de Bernard Lacroix..



Depuis vingt ans au moins

Je la voyais sur ma route.

 

J'ai laissé ma voiture

Et m'en suis approché.

 

Comment a-t-elle compris que je l'aimais ?

Une porte s'est ouverte :

 

Elle m'a souri !


 

Bernard Lacroix, Ciels, arbres et labours.

mercredi, 14 novembre 2012

Ciels, arbres et labours

 

 

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Gouache de Bernard Lacroix, couverture de Ciels, arbres et labours.

 

 

Á Bernard Lacroix

 

Le vent immobile a soufflé les peupliers

Se sont courbés les peuples liés

Enchaînés à leur vie d'estropiés

Dans leur conscience atrophiée.

 

Ils ont accompli une génuflexion

Pour une prière de grâce en action,

L'orgueil abaissé, l'humilité élevée

Sur leurs racines enfin respectées.

 

En point lumineux, la clarté s'est levée,

En bénédiction, les larmes sont tombées

Sur la croix à porter sans y être cloué,

Haletant son parcours à dessein dessiné.

 

Le poète a écrit, le peintre a saisi

L'insaisissable subtilité des cris

De nos errances lourdes, amorties

Par le doigt divin offert à l'artiste.

 

Annie Marriaux *, Préface à Ciels, arbres et labours de Bernard Lacroix.

*Directeur des Services Culturels du Conseil Général de la Haute-Savoie.

 

*

 

Je reviendrai sur ce très beau recueil, Ciels, arbres et labours, 24 gouaches et poèmes de Bernard Lacroix, dans des notes ultérieures.

EBM

 

 

 

 

mardi, 13 novembre 2012

Histoire d'eau

 

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Après Le Bassin, une autre petite histoire d'eau.


Je me rappelle le jour où l'Eléonore, qui à l'époque vivait juste à côté du musée, s'est vue "raccordée" au réseau communal d'eau potable. Avant d'accéder à la table et à tout ce qui fait qu'on note une présence humaine dans un édifice, il fallait pousser du genou le bouc qui  barrait l'entrée, attaché à sa mangeoire.

Notre cantonnier de l'époque, Albert Desjacques, avait creusé le trou dans la route qui allait permettre le raccordement au XXe siècle! Il introduit le tuyau de plastique à l'intérieur de la maison, juste au dessus de l'évier ( à côté du bouc), et demande à l'Eléonore qui, je m'en souviens, parlait en patois mâtiné de français:


Y vin qu'aque chuse? (1)

Ce "diable" avait embouché le tuyau et trompettait La Marseillaise.

Et l'Eléonore lui répond:

Na, y vin rin, y fa d'la musica. (2)


Jean-Michel Lacroix


(1) Il vient quelque chose?

(2) Non, il vient rien mais il fait de la musique.